HENRY NIVEAU de VILLEDARY (1904 – 2007)
La Confédération des Juristes catholiques de France vient de perdre son doyen. Le Président Henry de VILLEDARY, dont nous avions célébré dans la joie le centième anniversaire à notre colloque de 2004 avec Son Eminence le Cardinal Jean-Louis Tauran porteur d’un message du Pape Jean-Paul II, est pieusement décédé le 20 janvier dernier, entouré de tous les siens et réconforté par les sacrements de l’Eglise et les prières de ses nombreux amis.
Alerte centenaire, le Président de Villedary avait été soudainement frappé d’hémiplégie et d’aphasie au petit matin du 12 janvier et immédiatement transporté à l’hôpital de Saint-Cloud où il demeura toutefois parfaitement conscient durant plusieurs jours avant de s’éteindre tout doucement.
Ses obsèques ont eu lieu dans sa paroisse de Ville d’Avray où il résidait, depuis ces dernières années, chez une de ses filles. Une délégation de notre Confédération y a représenté tous les juristes catholiques de France. L’inhumation a suivi dans ses terres de Saint-Victor en Creuse.
C’est tout un pan de notre histoire qui s’en est allé avec M. de Villedary. A sa naissance, le 7 octobre 1904 à Dax, l’Etat n’était pas encore séparé de l’Eglise, le Pape Pie X était retenu au Vatican, le Président Emile Loubet était à l’Elysée, Théodore Roosevelt à la Maison blanche et le Tsar Nicolas II régnait sur toutes les Russies…Durant sa longue vie, M. de Villedary aura connu huit papes et quinze présidents de la République !
Lauréat de la Faculté de Droit de Toulouse, docteur en droit de la Faculté de Bordeaux après son diplôme spécialisé de sciences pénales, M. de Villedary a commencé sa carrière judiciaire en s’installant comme avocat à Bordeaux en 1925 avant d’entrer dans la magistrature dès 1931 pour être nommé dans la région parisienne, puis procureur de la République à Reims en 1937. Il retourna à Paris en 1940 mais fut aussitôt mobilisé avec le grade de capitaine d’infanterie. Fait prisonnier par l’ennemi, il connaîtra cinq longues années de captivité qui le mèneront dans les oflags d’Allemagne, de Pologne et d’Autriche. Au camp de Nuremberg, il fera profiter ses compagnons d’infortune de ses connaissances juridiques en participant aux enseignements organisés par le doyen Vedel.
En 1945, M. de Villedary retrouve le Tribunal de la Seine comme juge d’instruction et 1954 le voit accéder à la Cour d’appel de Paris d’abord comme conseiller puis, en 1960, comme Président de chambre jusqu’à sa retraite en 1972, date à laquelle il présidera la Commission du Contentieux de l’indemnisation des rapatriés d’outre-mer avant de se dévouer comme conciliateur au Tribunal de Guéret, dans sa Creuse familiale.
Depuis la Libération, le Président de Villedary était, en outre, bénévole dans une association d’aide aux personnes en difficultés des milieux culturels, artistiques et scientifiques ; il en fut d’abord le conseiller des présidents successifs, le Prince de Broglie puis le Doyen de La Morandière à qui il succéda en 1984… et jusqu’à ses 102 ans !
Ses services exemplaires furent reconnus par la République qui lui décerna la rosette d’officier de la Légion d’honneur, la cravate de commandeur de l’Ordre national du Mérite et la croix de guerre 39-45.
Le sens de l’apostolat de ce chrétien convaincu et actif l’a conduit à s’engager dans les rangs des Adorateurs nocturnes du Sacré-Cœur de Montmartre qu’il rejoignait encore ces dernières années. Entré en 1979 dans l’Ordre du Saint-Sépulcre de Jérusalem, il y fut élevé jusqu’à la dignité de Grand officier.
Le Président de Villedary fut aussi membre de l’équipe fondatrice de la Confédération des Juristes catholiques de France dans les années 1977-1978. Il en fut le plus fidèle des fidèles, assidu tant à tous nos colloques nationaux annuels qu’à nos congrès internationaux – dont celui de Monaco, en 2003, où il fut présenté à S.A.S. le Prince Albert dont l’aïeul, le Prince Albert 1er, avait comme aide de camp le grand-père de M. de Villedary – ou à nos pèlerinages à Rome dont celui du Jubilé de l’an 2000 restera mémorable par son Audience du Pape Jean Paul II qui fut particulièrement chaleureux avec notre doyen.
Remarquablement vif d’esprit jusqu’à son extrême vieillesse, le Président de Villedary était unanimement apprécié pour sa belle distinction, sa constante affabilité et ses grandes qualités de cœur et d’âme.
Il laisse un grand vide parmi nous mais il continuera à faire, du Ciel, beaucoup de bien sur la Terre.
R.I.P.